20. Le double stress du fumeur

Publié le par Jo

ARRÊTER de fumer est stressant. Tout le monde le sait. Du coup, on se rend souvent moins compte que fumer est stressant aussi. Si je m'en rends compte aujourd'hui, c'est tout simplement parce que les dernières miettes de stress de la défume sont en train de me quitter, et que je peux, enfin, comparer celui que j'étais quand je fumais et le non-fumeur que je suis devenu.

Fumer était stressant dans deux circonstances précises : quand je n'étais pas en train de fumer, et quand j'étais en train de fumer.

D'abord, souvenons-nous que la cigarette permet d'envoyer très rapidement au fond des poumons une dose importante de nicotine. De là, la nicotine passe presque instantanément dans le sang, et c'est là que le cerveau la pompe pour alimenter les récepteurs nicotiniques. Dès que nous avons fini une cigarette, nous cessons d'envoyer de la nicotine dans le sang. Celle qui s'y trouve est peu à peu captée par le cerveau ou éliminée par les reins. Le taux de nicotine dans le sang commence à diminuer, et ,si nous sommes nicotino-dépendants, le cerveau a de plus en plus de mal à trouver la nicotine dont il a besoin. Les récepteurs nicotiniques commencent à crier famine, et le stress monte. Il monte parce qu'il fait partie des conséquences physiologiques du manque de nicotine, et il monte parce que nous nous angoissons sur la survenue des autres symptômes de manque. Autrement dit, nous subissons à la fois un stress direct et un stress indirect. L'idée que le manque de nicotine va faire monter notre stress suffit à nous stresser ! C'est pour cela qu'écraser un mégot dans le cendrier lance la mécanique du stress. Plus j'attendais entre deux cigarettes, et plus je stressais, parce que je manquais de nicotine et parce que j'avais peur de manquer encore plus de nicotine.

Ensuite, quand je fumais une clope, j'étais partiellement conscient de ma dépendance. Je ne m'imaginais pas fumer par plaisir : si certaines clopes étaient agréables, je savais bien pourtant que je fumais par obligation. Et cela m'énervait. Souvent, je me disais que j'allais attendre encore un moment avant d'aller fumer ; mais moins d'une minute après, je m'avouais vaincu et j'allais allumer une cigarette. Quinze à vingt fois par jour, la cigarette me narguait en me rappelant que je lui devais obéissance. Les seules cigarettes qui ne me traitaient pas de faible étaient celles que je fumais par automatisme, sans même m'en rendre compte. Vous savez, celles qui font qu'on se retrouve avec deux cigarettes allumées en même temps... Comment allumer deux cigarettes en même temps et puis prétendre ensuite qu'on fume par plaisir ? Plus je fumais, et plus je stressais, parce que cela me montrait que j'étais nicotino-dépendant.

Aujourd'hui, je ne me dis plus jamais que je suis faible face à la cigarette. Je me dis au contraire que j'ai su m'en défaire, et je me sens en accord avec moi-même.

Aujourd'hui, je ne me demande plus jamais si je vais réussir à attendre dix minutes avant d'allumer la suivante, et je n'ai plus jamais la déception de ne pas tenir plus d'une minute. Au contraire, je me dis qu'il y quatorze mois que je ne fume plus, et que chaque jour qui passe depuis quatorze mois est une victoire dont je peux être satisfait.

Voilà. Ma dernière cigarette date d'il y a quatorze mois. Et la suivante, après m'avoir attendu longtemps, est allée se pendre un peu après Pâques. Bon débarras, vilaine !

Jo

Publié dans Ma vie sans tabac

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F
Jolie sérénité... Classe ton blog Jom, j'aime bien !Florence (dixit Estel)
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J
<br /> Merci Florence. Oui, la sérénité est un mot qui me sert de plus en plus au fil des mois qui me séparent du tabac. Il y a des moments où, tout en pensant ne pas refumer, on se demande si l'avenir<br /> s'éclaircira un jour. La réponse est oui, l'avenir finit par s'éclaircir ! Bises.<br /> <br /> <br />